Les salariés français, avec plus de 72 milliards d’euros en titres d’entreprises, deviennent le plus grand actionnaire devant l’Agence des participations de l’Etat. Dans le même temps, les analystes entrevoient pour la décennie à venir un nouveau régime financier (monétisation de la dette publique, déflation puis inflation, inversion revenu du capital vs politique salariale). Les investisseurs sont attentifs à l’évolution de l’actionnariat salarié, considéré comme stable, et au traitement des thèmes ESG par les entreprises.
Pour autant, les gouvernances d’entreprises ne changeront pas si facilement leurs vieilles habitudes. Comment dès lors reprendre la main ? Les salarié(e)s et ex-salarié(e)s actionnaires doivent prendre conscience de l’influence considérable que représente leur patrimoine financier investi, et enfin se regrouper pour agir comme des investisseurs activistes « sociaux » ; ils deviendront de facto le premier interlocuteur des entreprises, des grands investisseurs, des gestionnaires des fonds d’épargne et des pouvoirs publics. C’est une opportunité sans précédent pour la CFDT, disposant de la taille critique, pour accompagner cette démarche d’activiste social salarié, d’une part, en sanctuarisant ses administrateurs représentants des salarié(e)s actionnaires aux conseils d’administration, afin d’accélérer ce changement de prisme, avec un enjeu immédiat d’un développement de l’actionnariat salarié fixé à 10% par la loi PACTE. Et ceci malgré cette même loi qui retire aux OS cette chasse gardée (désignation des ARSA) pour l’ouvrir par mode électif à des associations d’actionnaires d’(ex-)salarié(e)s, voire, comme chez Engie, à des listes téléguidées de «directions». D’autre part, en favorisant les « coordinations financières » en structures gigognes jusqu’au niveau fédéral, telles qu’elles ont a été créées au sein de la CFDT d’Engie sous l’égide de la FCE. Elles permettent d’exercer méthodiquement nos pouvoirs auprès des gouvernances d’entreprises et des fonds de gestion de notre épargne salariale. Enfin, la CFDT doit favoriser l’actionnariat salarié et la création d’associations, à grande échelle, représentantes du patrimoine financier des salariés (pouvoir du mandaté du propriétaire sur ses actifs et les fiduciaires qui les administrent), et permettant de faire entrer le vent frais de la compétition au sein de l’entre-soi de nos élites. Comme ce fut le cas à la Fédération des Services où la création de l’ARASC chez Carrefour, en 2016, lui a permis de pouvoir être représentée et entendue lors des AG.
La CFDT peut aller encore plus loin en développant la structuration et l’animation de ces associations transversalement aux Fédérations. Une démarche pouvant aller jusqu’à la prise de mandats auprès des adhérents aux d’associations (porteurs d’actions au nominatif à titre personnel ou ayant reçu des actions gratuites de leur entreprise) pour peser encore plus. Les Fédération Chimie Energie et Construction Bois ont soutenu la création de l’association ARSAGE (arsage.org) qui a ouvert son adhésion à tous les (ex-)salarié(e)s actionnaires d’Engie, syndiqué(e)s ou non, créant un collectif de poids permettant d’être entendu en AG, de promouvoir le développement de l’actionnariat salarié et d’élire des candidats avec une représentativité élargie aux postes d’ARSA au conseil d’administration.
En finance comme ailleurs, « Un est le plus solitaire des nombres »
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