Faire reconnaître les compétences acquises au travail est une réalité. L’exemple de salariés chez L’Oréal.
Non loin de Saint-Quentin (Aisne), sur le site de Gauchy où l’on fabrique et conditionne pour le monde entier les parfums de luxe du groupe L’Oréal (Armani, Cacharel, Diesel, etc.), il y a quelques 280 salariés, dont 70 % de femmes, et nombre d’entre eux travaillent en postes. Patrick y est délégué CFDT et connaît bien l’entreprise. Il se souvient : « Avec mon CAP-BEP de maintenance je suis entré dans l’établissement il y a vingt ans et, trois ans plus tard, en 1993, je me suis engagé dans des cours du soir. J’ai obtenu un Bac professionnel mais je suis resté au coefficient 160 avec le même salaire. »
Depuis son poste de technicien de maintenance du site et au fil du temps, Patrick observe tant les évolutions du site que celles de sa propre activité. Il obtient le coefficient 190 tandis que son activité se diversifie, son expérience s’enrichit et multiplie ses compétences.
L’année 2008 marque la signature au sein de l’entreprise de l’accord d’entreprises pour les classifications dans lequel la CFDT a fait inscrire la reconnaissance des certifications (diplômes et titres) obtenues par la Validation des acquis et de l’expérience (VAE) – (voir encadré). Patrick contacte la direction et l’informe de sa décision de se lancer personnellement dans une démar-che de VAE afin de faire reconnaître les compétences qu’il a acquises depuis son entrée dans l’entreprise. Il annonce qu’il vise le BTS de Maintenance industrielle (MI). Il est rejoint par d’autres candidats à la VAE. Ils sont huit pour un BTS. Il y a aussi une opératrice de conditionnement qui vise un Bac Pro et un contrôleur qualité qui compte sur un BTS Qualité.
Au moment où des restructurations se multiplient dans les entreprises, l’avenir se révèle incertain. Aussi, Patrick veut se donner quelques atouts en faisant reconnaître les compétences acquises, fruits de son expérience.
Pour s’engager dans la démarche VAE, il faut compléter un dossier administratif. Les dix volontaires s’adressent à la direction qui, après discussion, accepte que les candidats se rendent au Greta de Saint-Quentin afin qu’ils puissent être accompagnés pour remplir les dossiers. Le temps passé sera imputé sur le temps de DIF acquis par chacun.
Le premier dossier, dit de recevabilité, est en quelque sorte un super curriculum vitae. C’est aussi le moment d’annoncer et de vérifier si le diplôme ambitionné correspond bien au parcours individuel.
Le Greta remet ensuite à tous le second dossier. Il permet de décrire avec précision chaque activité en les associant aux compétences correspondantes mises en œuvre. Ce travail d’inventaire prend quelques séances et fait apparaître des manques en anglais, notamment en vocabulaire technique. Il faut pour certains suivre quelques heures de cours.
Patrick dépose son dossier complété. Plus tard il est convoqué et se retrouve devant un jury composé de neuf personnes. Il y a là un représentant de l’Education nationale, un professeur de français ; un professeur de technologie et des représentants du monde industriel.
C’est là, sur la base du dossier rempli en référence au BTS visé, que Patrick est interrogé. « Et cela se déroule telle une conversation, en une demie-heure ». Un peu plus tard, on lui signifie qu’il a validé ses compétences. Le voilà avec un diplôme en poche ! Et le coefficient 250 ne tarde pas. Les neuf autres candidats obtiennent aussi leurs diplômes.
Aujourd’hui, l’exemple de Patrick a fait des émules et d’autres salariés sont volontaires. Quant à la direction, elle vante désormais, cerise sur le gâteau, les mérites de la VAE dans tous les sites du groupe.