Le combat juridique dure depuis 5 ans. Cependant, il reste encore une dernière étape à passer avant de goûter sans retenue ce succès. Nous y reviendrons un peu plus loin, pour le moment, nous vous livrons le début de notre histoire !
L’origine de cette action juridique prend naissance en 2010 chez Interpane Glass France, un site mosellan. Dans cette entreprise, il était d’usage que les DP se fassent assister par un représentant syndical par organisation syndicale. Or à la faveur d’un changement de DRH, ce dernier remet en cause cette pratique.
La section CFDT revendique l’application de l’article L 2315-10 qui mentionne : « Les délégués du personnel peuvent, sur leur demande, se faire assister d’un représentant d’une organisation syndicale». La direction rétorque que la CFDT se trompe et que le code du travail mentionne uniquement le fait que les élus DP peuvent se faire accompagner par UN représentant syndical pour toutes les organisations syndicales. Et que ce représentant syndical peut être différent à chaque réunion (CFDT-CFTC-CGT-FO-CFE).
Face à ce blocage, la section saisit le syndicat lorrain pour faire valoir son droit. Un dossier juridique est donc ouvert en octobre 2010 et déposé au conseil des prud’hommes en formation référé. Ce dernier rend une ordonnance le 9 novembre 2010 où le syndicat obtient gain de cause. La présidente du TGI explique même sa décision en se fondant sur une image « lorsqu’il est conseillé aux enfants d’emporter un vêtement de pluie, il n’a jamais été prétendu qu’il s’agissait d’un seul vêtement de pluie », logique, mais Interpane n’en reste pas là et décide faire appel. Contre toute attente, la cour d’appel de Metz déboute par un arrêt le 12 février 2013 le syndicat CEL au prétexte que l’article L 2315-10 désigne les « délégués du personnel » et non pas chaque délégué du personnel. Que notre interprétation viendrait à transformer les réunions mensuelles des délégués du personnel en réunions avec les représentants des organisations syndicales ».
Cette décision crée la stupéfaction de l’avocat en charge du dossier et bien entendu du syndicat. Nous décidons de nous pourvoir en cassation où, au passage nous devons batailler dur pour la prise en charge du dossier CNAS (sans jurisprudence établie, difficile d’être certain de l’issue).
Cette pugnacité va payer puisque le 28 janvier 2015, un arrêt de la Cour de Cassation (Cass. soc. 28-1-2015, n° 13-24242 PB) est rendu. Les hauts magistrats ne partagent pas la décision de la cour d’appel de Metz. Ils affirment au contraire que l’article L 2315-10, alinéa 2 du code du travail ne limite pas à un représentant le nombre de représentants syndicaux pouvant être appelés à assister les délégués du personnel lors de la réunion prévue à l’article L 2315-8, mais à un représentant par confédération syndicale.
Il est par ailleurs précisé : chaque délégué du personnel détient la faculté individuelle de solliciter un représentant syndical pour l’assister dès lors que son étiquette syndicale diffère de celle des autres élus.
Cette victoire syndicale est importante pour l’exercice des missions des DP qui peuvent avoir le soutien d’un représentant syndical. Cette assistance renforce le poids de cette institution représentative avec l’apport d’une compétence syndicale pour faire face aux problématiques de plus en plus complexes qu’ont à gérer les élus DP.
Même si cette décision a un caractère jurisprudentiel, il nous faut attendre le 3 juin 2015 pour voir si le jugement en référé devient (enfin!) définitif et pour pouvoir classer le dossier – ou si Interpane décide de saisir la cour d’appel de Nancy suite au renvoi de la cour de cassation pour que de nouveaux juges statuent sur cet article L 2315-10 du Code du travail.