L’ouverture récente du procès d’AZF remet sur le devant de la scène la prise en compte des risques industriels. Depuis le 21 septembre 2001, des actions ont été menées. Par les partenaires sociaux, avec notamment des accords sur la sécurité dans les branches chimie et pétrole. Par les pouvoirs publics, avec la loi Bachelot du 3 juillet 2003 sur les risques industriels.
La catastrophe d’AZF nous révèle ,cependant, le manque de traçabilité du suivi des produits dans l’usine. Ainsi sept ans après l’explosion, le procès promet une belle bataille d’experts. Aujourd’hui encore, certaines parties civiles contestent la thèse de l’accusation du mélange de produits, d’autres défendent celle de l’attentat ou d’autres encore, la cause électrique ou l’incident préalable à la SNPE. Aujourd’hui, les victimes de l’explosion du hangar 221 d’AZF auraient apprécié qu’une « boîte noire » retrace les flux des produits dans l’usine… Il est grand temps, comme dans d’autres secteurs, que les dirigeants de l’industrie chimique considèrent la traçabilité comme un dispositif de prévention et d’analyse en cas d’accident.
La traçabilité est fortement développée et réglementée dans l’industrie agroalimentaire. Dans l’industrie aéronautique, les fameuses « boîtes noires » permettent, dans la majorité des cas, d’établir les causes du crash d’un avion.
Dans l’industrie lourde, qu’en est-il ? Les certifications (normes ISO) permettent de garantir la qualité des produits, ainsi que les procédures de fabrication. La traçabilité, en tant que telle, n’est pourtant pas toujours activée car elle est encore trop souvent perçue comme un contrôle pesant plutôt qu’une mesure veillant au bon fonctionnement d’une usine. L’absence de lien avec la clientèle, les secrets de fabrication sont les causes du repli, et du silence. La traçabilité existante reste donc imprécise.
Pourtant, les industriels, l’administration et les experts se sont mis d’accord sur la manière de prendre en compte la gravité potentielle d’un accident, le nombre de personnes touchées et la cartographie des lieux en cas de catastrophe. Des études de danger ont certes été menées dans 611 établissements. Mais cela n’a débouché à ce jour que sur cinq plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Dans la branche chimie, une seule entreprise a négocié la déclinaison de l’accord national. Ce constat montre l’insuffisance de prise en charge des risques industriels par les différents acteurs.
Il est grand temps que les questions de traçabilité soient dans les industries à risque au cœur des process industriels.