M.Fillon a récemment exprimé sa volonté de réformer en profondeur les régimes spéciaux. Nul doute qu’il s’agit, dans cette période préélectorale, d’un signe à une partie de l’électorat de droite, hostile par idéologie au secteur public. Mais comme l’affirme François Chérèque, c’est la plus mauvaise manière d’entrer dans ce débat.
Les régimes spéciaux concernent des entreprises comme la SNCF, la RATP, EDF, ou encore Gaz de France. Mais aussi d’autres secteurs aussi divers que variés, comme les professions libérales ou les députés. La comparaison entre régimes est complexe. Pour exemple, la base de l’assiette de calcul des retraites diffère. Dans le régime général, elle se base sur les 25 meilleures années de rémunération, et inclut la plupart des primes. Dans les régimes spéciaux, elle se base sur le ou les derniers mois de salaire, n’incluant aucune prime.
Pour autant, une question de fond, commune à l’ensemble des régimes, demeure. Celle de l’emploi des seniors. Sur ce sujet, le Medef a une approche pour le moins contradictoire. Il plaide pour un départ à la retraite allant bien au-delà de 60 ans, et négocie et signe un accord interprofessionnel sur la question. Mais dans le même temps, il continue dans les entreprises à exclure les salariés âgés, du travail. Dans le secteur public, les salariés ayant du service actif (pour travail pénible) sont mis d’office à la retraite à 55 ans ; pour les autres, c’est à 60 ans. Pourtant certains seraient prêts à poursuivre leur activité. Dans le secteur privé, c’est avec les plans sociaux que les salariés partent bien souvent avant l’âge prévu. Et ces départs ne sont pas créateurs d’emplois puisque dans la majorité des cas, ces salariés ne sont pas remplacés. Au regard de cette situation, la question de l’emploi des seniors est donc centrale.
En 2008, au moment de la réouverture du dossier des retraites, des discussions auront lieu. La CFDT en a d’ailleurs débattu lors de son congrès confédéral en juin dernier à Grenoble. La prise en compte de la pénibilité constituera une revendication forte, avec notamment la défense d’un haut niveau de retraite et d’une revalorisation des plus basses pensions. Ce rendez-vous doit être l’occasion d’une remise à plat des réalités. Des questions lourdes doivent être posées lors des futures négociations. Quelles évolutions des régimes au regard des aspects d’équité entre salariés et d’équilibre financier ? Quelle solidarité entre les régimes de salariés et les autres ? Serait-il acceptable qu’au moment où les dirigeants d’entreprise obtiennent lors de leurs départs des indemnités considérables, la solidarité ne concerne que les salaires ? Quelle redistribution entre capital et travail au profit d’une solidarité nationale intergénérationnelle ?
Le rendez-vous de 2008 sera l’occasion de répondre à toutes ces interrogations, de les analyser, et d’y apporter des réponses fondées sur la justice sociale.