L’accident dramatique survenu à Amiens dans l’usine Dunlop illustre malheureusement les conséquences du choix d’une direction qui fait passer les résultats financiers avant la sécurité. Un salarié vient de payer le prix fort d’une telle politique.
L’annonce sur toutes les places boursières de la chute du cours de l’action Goodyear traduit les difficultés que rencontre la multinationale américaine pour digérer sa fusion avec le japonais Sumitomo Dunlop.
Depuis plusieurs mois, sur tous les continents, la consigne a été donnée : il faut faire des efforts pour gagner de l’argent. Alors, dans son usine d’Amiens, la direction a décidé de faire l’impasse sur la mise en conformité de certaines machines. C’est le cas des calandres et des systèmes d’enroulage. Principalement constituées de gros cylindres, ces machines écrasent les bandes de caoutchouc pour en faire des bobines qui seront ensuite utilisées pour la confection des pneumatiques.
Une norme nationale de conformité est imposée (R. 178) pour ces machines jugées particulièrement dangereuses. Barres de protection et coupe-circuit sont une obligation. Le système d’enroulage lui aussi doit être protégé. Mais là, les protections sont malheureusement hors service.
Il y a déjà quelques semaines, un salarié intérimaire a été accidenté. Une main quasiment écrasée. Peu importe, on lui a signifié la fin de sa mission, et la direction a décidé que les réparations ne concerneraient que l’une des machines. La suite on la devine.
Il y a quelques jours, alors que la vitesse ne peut être réduite sur le poste d’enroulage, un salarié intervient sur la bande de caoutchouc. En un instant ses doigts se retrouvent pincés. La main puis tout le bras sont happés. Le salarié hurle, il est coincé. Puissante, la machine fait son œuvre : le bras, à la hauteur de l’épaule est arraché. Les collègues de l’atelier arrivent. Trop tard.
Hospitalisée, la victime est maintenue en coma artificiel. La direction de l’entreprise se fait discrète mais a demandé une vérification de toutes les machines, sur tous les sites ! Soucis soudain de prévention ? Mais elle refuse toute enquête du CHSCT et écarte les représentants du personnel.
Plus que jamais, et là davantage encore, la question des conditions de travail demeure une priorité, d’autant qu’en la matière ce sont les salariés qui paient les pots cassés, jamais les actionnaires !
« Perdre sa vie à la gagner ». En vingt ans ce slogan CFDT n’a malheureusement pas pris une ride.