Une trentaine de délégués de la branche caoutchouc se sont retrouvés durant cinq jours pour une formation CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) « spéciale troubles musculo-squelettiques » (TMS). A l’issue de la semaine, chacun a regagné son entreprise avec l’ambition de tordre le cou aux TMS.
De comparaisons de situations de travail en états des lieux, le constat fait par les délégués du comité national de branche caoutchouc est sans appel : la question des conditions de travail reste un problème majeur ! Dans les usines des industries du caoutchouc, les exemples de salariés victimes de troubles musculo-squelettiques (TMS) sont légion.
Pour ne pas en rester au seul constat, pour éviter que le mal ne devienne endémique et inéluctable, les délégués ont décidé d’agir.
En illustrant le jeune principe de précaution par le vieux dicton « Mieux vaut prévenir que guérir », ils ont choisi la formation comme moyen de prévention. Une première session de formation « spéciale TMS » s’est tenue en novembre 2001 pour les élus de CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail).
Piqûre de rappel aux anciens
et formation des nouveaux élus
Piqûre de rappel pour les anciens, découverte pour les nouveaux élus, cette formation a été l’occasion de rappeler les dispositions légales qui octroient de véritables moyens aux délégués en matière de sécurité et de prévention. On peut véritablement agir. L’exemple du CHSCT de Cholet en est l’illustration (voir encadré).
Aller à la rencontre de tous les salariés, c’est le rôle des délégués. Pourtant, certains salariés craignent encore de se dévoiler par crainte d’être jetés dehors, licenciés car trop usés. C’est la loi du silence qui doit être brisée. Pour cela, les adhérents ont une place essentielle, celle de la plus grande proximité.
Tordre le cou aux TMS
Repérer les machines qui mutilent, mais ne pas en rester là. Identifier grâce aux salariés les situations et organisations de travail qui les brisent insidieusement. Travail d’ampleur, mais « l’enjeu vaut la chandelle ». Cet inventaire servira de base à la mise en place de plans de prévention dans les entreprises et, au-delà, dans la branche.
Tordre le cou aux TMS, c’est l’objectif que se sont donné les équipes syndicales.
Trelleborg : quand le travail mutile
A Carquefou, depuis un an les usines Draftex sont suédoises suite au rachat des sites par Trelleborg. Mais derrière les murs repeints rien n’a changé. La qualité des conditions de travail demeure la préoccupation majeure. Les TMS déclenchent chaque année la reconnaissance de cas de maladies professionnelles. Devant les autoclaves ou les postes de finition, les gestes répétitifs se multiplient. Lame de cutter appuyée des milliers de fois ou encore assemblage de pièces d’amortisseurs. Les muscles comme les articulations sont meurtris. La douleur lancinante se transforme en handicap. Aux portes des autoclaves la technique et la force sont requises. Les arrêts maladie ne s’y comptent plus. Alors la gestion du personnel a doucement glissé vers la mise en place de l’intérim. La sous-traitance massive se retrouve aussi dans un atelier qui occupe les salariés d’un Cat (Centre d’aide par le travail) installé à demeure. « La direction voudrait sous-traiter les risques et leurs conséquences qu’elle ne s’y prendrait pas autrement » affirment les délégués de l’entreprise.
Cholet : agir avec le CHSCT
A Cholet, le bilan 1998 du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) révèle que 223 intérimaires ont totalisé 459 accidents du travail. Pour la même période, les 1 578 salariés en CDI ont été victimes de 320 accidents. En moyenne un accident pour cinq salariés, soit dix fois moins que pour les intérimaires.
Les élus CFDT du CHSCT Michelin proposent la création d’une commission d’accueil et de suivi des intérimaires. Simultanément une enquête est lancée. Elle va souligner un fossé des générations entre les « michelin » dont la moyenne d’âge est de 47 ans et des intérimaires âgés de 20 ans. Elle fait aussi état d’un fossé culturel entre les « locaux » et des intérimaires venus de Nantes ou bien de Lille. L’intérimaire est un peu le corps étranger. A ce constat s’ajoute l’insuffisance de la formation. « On a vu un intérimaire embauché à 5 heures qui se blesse à 5 h 10. Remplacé à 5 h 15 par un autre intérimaire qui se blesse lui-même dix minutes plus tard ».
« Un intérimaire n’est pas un homme à tout faire. Son statut précaire en fait un travailleur plus vulnérable ». Les interventions de la CFDT sont entendues et les mesures de prévention proposées par la commission d’enquête sont mises en œuvre. La direction reconnaît le bien fondé de l’action des élus au CHSCT. Aujourd’hui le taux d’accidents est redescendu au niveau de celui des salariés permanents.