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La souffrance de Mayotte…

Depuis le 31 mars 2011, Mayotte est le 101ème département français. L’île vient d’être marquée par 45 jours d’une grève « contre la vie chère et pour une vie décente ». Le Magazine a rencontré Wilfrid et Michel...

Depuis le 31 mars 2011, Mayotte est le 101ème département français. L’île vient d’être marquée par 45 jours d’une grève « contre la vie chère et pour une vie décente ». Le Magazine a rencontré Wilfrid et Michel.

Le Magazine de mars 2010 annonçait la départementalisation en titrant « un grand chantier en perspective ». On parlait du développement de la CFDT au sein des entreprises Total et Electricité de Mayotte (EDM) dans laquelle EDF détient 25% du capital. Si les choses ont bougé de ce côté, ce sont les revendications posées par les salariés et les habitants de l’île qui doivent obtenir des réponses. Wilfrid Shock-Torap est secrétaire général du syndicat CFDT Énergie de l’île de la Réunion. Michel Campéro est le coordonnateur du groupe fédéral DOM de la FCE.

Mag FCE : Vous êtes retournés tous les deux à Mayotte. Quelle est votre perception de la réalité, sur le terrain ?
Wilfrid : Les manifestations ont débuté dès la fin septembre et, pendant un mois et demi les habitants ont crié les difficultés qu’ils rencontrent. D’aucuns parlaient d’une situation sociale et économique très difficile, causée par un mal récurrent qui ronge aussi les autres départements d’outre-mer : la vie chère. Mais ce n’est pas la seule cause des difficultés.
Michel : Les mouvements de ces dernières semaines ne se résument pas aux barrages routiers et aux affrontements des jeunes avec les forces de l’ordre. L’affection est bien plus profonde et il est nécessaire d’en rechercher les racines. Ainsi, on ne peut résumer les revendications au prix de la viande, du gaz et du sable. On ne peut non plus prétendre, comme certains le proposent, de solutionner le problème en proposant des « tickets de rationnement ». De la même façon, on ne peut accepter que les diminutions de prix ne durent qu’un trimestre. Pas question non plus, de prendre des décisions contraires à la volonté de l’immense majorité des manifestants, au risque de soulever une nouvelle colère.
Wilfrid : Le passé doit nous inspirer pour reproduire ce qui est efficace et juste et rejeter ce qui engendre les échecs et les larmes. Le patronat local doit se mettre à la table des négociations. Il ne suffit pas d’inciter les travailleurs à cesser le travail et à descendre dans la rue, encore faut-il savoir pourquoi ils y vont et quels sont les objectifs atteignables envisagés.
Michel : Sur place, la Cisma CFDT (centrale interprofessionnelle des syndicats de Mayotte), s’est attachée à « gérer » la situation, lançant des appels au calme, soutenant les familles en grandes difficultés tout en maintenant un lien avec les responsables politiques et économiques.

Mag FCE : Avez-vous eu la possibilité de revoir Saïd Boinali, le représentant de la Cisma CFDT et leader de l’intersyndicale ?
Wilfrid : Saïd Boinali était heureux de nous rencontrer pour nous faire part de ses difficultés et de son isolement. Notre présence l’a réconforté. Ses propos traduisent je crois, la réalité vécue « Nous sommes dans un Etat colonial ».
Michel : C’est dur de dire cela alors que nous sommes dans un département français, mais la fracture est réelle entre métropolitains et mahorais, entre riches et pauvres, c’est ce que nous avons ressenti, ici à Mayotte.

Mag FCE : L’accord de fin de conflit proposé par le médiateur de la République apporte-t-il la solution ?
Michel : L’issue de ce conflit trouvera sa source dans la négociation, le dialogue et des gestes concrets du gouvernement. L’Etat doit mettre en œuvre les moyens pour permettre l’importation à prix réduits des produits de consommation courante.
Le patronat doit s’orienter, dans la durée, vers une tarification des produits plus conforme à la réalité locale.
Les organisations syndicales, partenaires sociaux indispensables, doivent rester des curseurs d’alerte et la force de proposition à l’image des revendications des salariés. Les manifestations ne sont que la solution ultime résultant de l’échec du dialogue.
Wilfrid : La démarche de proposition d’accord va dans le sens d’une recherche de solution par le dialogue. C’est ce que demande la CFDT. Mais encore faut-il que son contenu soit acceptable. La baisse des prix proposée est insuffisante et limitée dans le temps. De plus, elle ne s’applique pas à tous les produits de première nécessité. L’arrivée d’un expert sur les prix est peut-être un début de solution.
Michel : La départementalisation doit se traduire par l’arrivée des valeurs de la République. Il est inacceptable de voir tant de bidonvilles et des enfants livrés à eux-mêmes dans les forêts.

Il est vital pour l’avenir de Mayotte, que les partenaires économiques, politiques et sociaux se retrouvent rapidement afin de parvenir à des solutions acceptables par tous. La population mahoraise est dans une situation précaire et le tissu économique local, en grande difficulté, ne survivra pas à un enlisement du conflit.

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