Cinq mois après l’annonce de la restructuration de Total Petrochemicals France à Saint-Avold, en Moselle, le Syndicat Chimie Energie Lorraine et la liaison du groupe Total réunissaient le 31 janvier les sections syndicales de Total Petrochemicals France, d’Arkéma, d’Inéos et d’Altuglass pour faire le point sur les actions déjà menées par la CFDT et définir la stratégie à poursuivre.
Dès janvier 2006, la section syndicale CFDT de Total Petrochemicals France avait pressenti les risques de fermeture d’un vapocraqueur. Pressentiment qui résultait d’un travail de veille mené sur de nombreux mois. En déclenchant la procédure d’alerte, la CFDT obligeait alors la direction de Total Petrochemicals France à dévoiler son projet de réorganisation: fermeture d’un vapocraqueur, en effet, et transfert de l’activité styrène sur Gonfreville, en Seine-Maritime. En chiffres, cela se résumait à 400 Ma d’investissement et à la suppression de 300 emplois, dont 243 sur le site de Carling, en Moselle. Dès l’annonce de la restructuration, la CFDT était en capacité de proposer une alternative. Pour seulement 100 Ma d’investissement, elle proposait de traiter les condensas (liquide issu de l’exploration pétrolière) pour fournir du naphta permettant de produire de l’éthylène à un coût inférieur de 30 %, et du gazole valorisé à la hauteur de 60 Ma par an. Un projet économiquement intéressant, que les directions de Total Petrochemicals France et du groupe Total devaient bien reconnaître comme tel. Mais les démarches au sein du groupe Total et les contacts pris avec les élus locaux n’auront pas suffit pour, à ce jour, maintenir l’emploi sur le bassin de Carling.
Qui plus est, la fermeture programmée, pour le début de l’année 2009, d’un second vapocraqueur percute de plein fouet, cette fois, l’ensemble de la chimie lorraine. Puisque la finalité de cette nouvelle réorganisation est l’arrêt de la production d’une grande partie des matières premières nécessaires à l’activité de nombreuses entreprises chimiques de la Moselle. Durant toute la période de consultation du comité d’établissement, une solidarité entre les équipes CFDT des principales entreprises concernées s’est mise en place, renforcée par une mobilisation intersyndicale. Le point d’orgue aura été, sans conteste, la manifestation du 4 décembre 2006 à Sarralbe, où près de 1 000 salariés de plusieurs entreprises et élus locaux se sont mobilisés pour le maintien de la chimie en Moselle.
Face à cette situation, l’ensemble des militants convient qu’il faut maintenant travailler en deux temps. Il faut, dans un premier temps, s’assurer du maintien de l’emploi dans le bassin de Carling. Ici, la loi de modernisation sociale et l’article 321-17 du Code du travail obligent les entreprises à revitaliser le bassin d’emplois. Il s’agit notamment de faire entendre la voix de la CFDT entre d’un côté, les intérêts de la direction de Total et de l’autre, ceux des élus locaux. Certes, la chose ne sera pas facile. Le 28 février dernier, Total Petrochemicals France signait d’ailleurs une convention volontaire de revitalisation économique, sous l’égide des pouvoirs publics de la région de Carling, mais sans concertation aucune avec les organisations syndicales… ! Mais si la partie s’annonce difficile, compte tenu aussi des échéances électorales prochaines, la CFDT entend bien être offensive.
Il faut, dans un second temps, assurer l’avenir de la chimie en Lorraine à l’horizon 2010. Et ici, toutes les équipes syndicales CFDT de la chimie sont concernées. Le Syndicat Chimie Energie Lorraine a d’ores et déjà mis en place un groupe de travail, sous la responsabilité de Gérard Uhring, animateur du comité territorial de la branche Chimie. Ce groupe a pour mission d’examiner la situation économique et sociale des grandes entreprises chimiques de la Lorraine en premier lieu, puis des TPE/PME par la suite. Cette réflexion doit permettre au syndicat de formuler des propositions pour assurer un avenir à la chimie lorraine. L’enjeu n’est pas simple, puisque les intérêts des entreprises concurrentes divergent. Il faudra donc dépasser les stratégies d’entreprise et avoir une vision globale allant dans le sens de l’intérêt général. Nul doute que les équipes lorraines sauront relever ce défi.
vers des accords européens
Si nous n’en sommes pas encoreà l’ouverture de véritables négociations qui mèneraient à la conclusion d’accords européens pour la chimie, une chose est sûre, le dialogue est désormais instauré entre l’Emcef et l’Eceg. Comprendre entre la représentation européenne des salariés de la chimie, et celle des employeurs.
Dans ce cadre, une réunion entre leurs représentants s’est tenue en février à Bruxelles. Elle a dessiné la perspective d’une conférence européenne sur la chimie en novembre prochain, et tracé les pistes d’un travail commun pour 2007 et 2008.
Il s’agit notamment de poursuivre la réflexion engagée sur la formation tout au long de la vie et la valorisation des compétences. Les thèmes de la santé, de la sécurité, de la prévention, et de la reconnaissance des maladies professionnelles restent bien sûr d’actualité. Autant de points sur lesquels l’Emcef voudrait parvenir à des accords « un peu contraignants » pour faire avancer les choses. Quant à l’avenir de l’industrie chimique en Europe, au-delà des difficultés de recrutement soulignées par les patrons européens, ce sont surtout les restructurations à répétition qui interrogent… les représentants des salariés !