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L’AVENIR DE L’AUTOMOBILE en question

Au-delà des rapports difficiles entre les constructeurs et les équipementiers, c’est l’avenir même de la filière automobile qu’ont posé les participants lors du colloque interfédéral tenu le 6 février.

Au-delà des rapports difficiles entre les constructeurs et les équipementiers, c’est l’avenir même de la filière automobile qu’ont
posé les participants lors du colloque interfédéral tenu le 6 février.

Mardi 6 février 2007. Paris, dans les locaux de la Maison de la Mutualité. Pas moins de 400 personnes avaient répondu à l’invitation des trois fédérations CFDT organisatrices de l’événement : la Fédération Chimie Energie (FCE), la Fédération Mines Métallurgie (FGMM), et la Fédération Habillement Cuir Textile. Du côté des militants CFDT présents, beaucoup de salariés des entreprises de construction d’automobiles (Peugeot-Citroën, Renault-Nissan, Toyota, …) comme des entreprises sous-traitantes du secteur (Faurecia, Michelin, Plastic Omnium, Trelleborg, Vistéon, Woco, …). Dans la salle aussi, des représentants des employeurs et des fédérations patronales. Sans oublier les journalistes venus couvrir l’événement.

Une première, en effet, que ce colloque organisé pour engager un débat entre les différentes parties prenantes sur les questions qui se posent depuis quelques années dans les entreprises sous-traitantes des constructeurs. Augmentation du prix des matières premières, pressions sur les coûts, baisses des commandes, transferts d’activités, restructurations et autres fermetures, auxquelles s’ajoute le recul de production des constructeurs français.

Dans ses propos d’ouverture, Dominique Gillier, Secrétaire général de la FGMM, a souligné l’importance de la filière automobile qui « est, sans conteste possible, l’un des fleurons de l’industrie française. ». Et d’ajouter que l’Europe « assure 30 % de la production mondiale. Mais la filière et les salariés qui en dépendent, souffrent d’une conjoncture et d’évolutions qui leur sont défavorables. (…) Et l’emploi devient précaire. ».

Après ce premier regard porté sur le secteur, le cabinet d’expertise Syndex a brossé sans faux-semblants le tableau de la réalité automobile en France, mais aussi en Europe, en soulignant la dimension désormais mondialisée du marché de l’automobile. Hormis l’Europe de l’Est, la croissance de l’industrie automobile est aujourd’hui tirée par les pays émergents, notamment la Chine et l’Inde. Et les pressions exercées sur les équipementiers sont d’autant plus fortes que ces entreprises sont le plus éloignées du donneur d’ordres et se situent au bout de la chaîne de sous-traitance en cascade. Pour l’expert interrogé, il est clair que le produit automobile doit évoluer pour répondre aux exigences à venir en termes de réduction des émissions de CO2, à la fin du pétrole, au développement de l’électronique, à l’évolution des matériaux, ou encore au recyclage des produits. L’expert n’a d’ailleurs pas manqué de pointer l’absence de politique industrielle en Europe en matière de recherche, d’innovation et de développement.

La parole a ensuite été donnée aux militants CFDT venus témoigner de leur réalité. Ainsi pour Fred Dijoux, délégué syndical central chez Renault-Nissan, les premières victimes des difficultés que rencontre le constructeur sont, sans nul doute, le sous-traitant et ses salariés. Si son entreprise s’est dotée d’un accord l’engageant à respecter les droits fondamentaux, notamment chez les sous-traitants, le débat montrera par la suite que la quasi-totalité des entreprises concernées ne connaît pas cet engagement.

Alain Kerdouane, lui, est délégué chez MPAP. L’entreprise, qui produit des tissus d’habillement pour les habitacles, compte 360 salariés et le dialogue social y est de qualité. L’équipe syndicale rencontre régulièrement l’équipe implantée chez Peugeot-Citroën, son principal client. Mais Alain déplore le manque d’anticipation de la charge de travail. « On est dans le juste à temps ».

Chez Trelleborg, équipementier du Caoutchouc qui compte 1 250 salariés à Carquefou, la sonnette d’alarme a été tirée. L’activité est en baisse et les résultats s’en ressentent. « On subit les baisses de prix. Et, si l’on ne peut pas parler encore de délocalisations, on observe tout de même que l’entreprise n’est plus retenue ni référencée pour les nouveaux marchés. Alors la direction gère les effectifs au fil de l’eau et recourt à l’intérim. » Et Yannick Bernard d’ajouter qu’il y a urgence à mettre en place une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). « Même s’il est à craindre qu’elle n’arrive trop tard… »

Pour Manuel Brocart de Vistéon, les pratiques du management américain du groupe pèsent lourdement en termes de dialogue social. « Les patrons nous racontent vraiment n’importe quoi. »
Du côté des moulistes (ceux qui fabriquent les moules servant à l’injection des pièces en plastique), Jean, salarié de la Sermo, déplore la quasi-disparition en France de son activité qui a, elle, réellement été délocalisée. C’est alors que se pose la question du reclassement de ces salariés qui ont de véritables compétences de professionnels spécialisés. Et d’ajouter avec un brin d’humour, même s’il est un peu noir, que les directions, à défaut de gérer l’emploi, deviennent des spécialistes des plans sociaux qui n’ont de social que le nom…

Pour Pascal Geiger, du ministère de l’Emploi et présent lui aussi à la table ronde, « un dialogue très riche s’instaure aujourd’hui, mais qui inquiète à la fois. ». Interpellé pour aider financièrement les plans de sauvegarde de l’emploi, il est bien conscient qu’il s’agit davantage de mettre en œuvre une véritable GPEC dans les entreprises et sur les territoires sur lesquels elles sont situées.
De la seconde table ronde, elle aussi particulièrement intéressante, on retiendra l’annonce chiffrée faite par le représentant patronal de la Métallurgie. « C’est à une perte de 50 000 emplois qu’il faut s’attendre d’ici à 2012. Il y aura quelques 150 000 départs et seulement 100 000 embauches. Et ces dernières devront se faire avec des jeunes qualifiés. » Voilà un véritable défi à relever !

Dans son intervention, Marcel Grignard, Secrétaire national CFDT, a souligné l’heureuse initiative des trois fédérations CFDT qui ne veulent pas en rester à la seule gestion des difficultés. Il a mis l’accent sur la nécessité du dialogue pour affronter ensemble les problèmes. Pour autant, rien ne doit faire oublier que les salariés sont bien la première richesse des entreprises. « Evidemment, a t-il ajouté, il faut se mettre dans la perspective d’une politique industrielle européenne et, dès maintenant, renouer avec la formation professionnelle. » Autant dire que le chantier reste vaste.

C’est Patrick Pierron, Secrétaire général de la FCE, qui aura conclu le colloque. Il a mis l’accent sur la nécessité de poursuivre le travail engagé. De le faire au niveau des fédérations CFDT bien évidemment, mais plus encore sur les territoires, entre les syndicats concernés et les équipes impliquées. De quoi traduire en actes ce vieux slogan CFDT qui n’a rien perdu de sa pertinence : l’avenir sera ce que nous en ferons !

LA FILIERE AUTOMOBILE

Porter le regard sur le secteur automobile ne peut se limiter à regarder les usines d’assemblage comme celles de Sochaux ou Sandouville, ni les seules marques Renault ou Peugeot. Une telle vision, trop restrictive, reviendrait à ne regarder que la partie visible de l’iceberg qu’est la construction automobile, véritable puzzle dont les pièces proviennent de nombreux secteurs industriels. Acier, aluminium, matières plastiques, verre ou bien encore tissus, cuir, caoutchouc et produits chimiques.

Ce sont bien plusieurs secteurs industriels qui sont concernés.
La filière automobile, dans sa globalité, compte en France quelques 1,4 millions de salariés, répartis dans près de 10 000 entreprises de toute taille. Constructeurs, équipementiers, sous-traitants et fournisseurs y mobilisent des compétences diverses. Si les régions qui concentrent l’activité sont l’Ile-de-France, la Normandie, le Nord et l’Est, il faut aussi compter avec l’Ouest, le Centre et la région Rhône-Alpes.

Quant aux perspectives de croissance en volume, c’est du côté des pays émergents qu’elle se trouve (Chine, Inde ou Amérique du Sud). Côté européen, le défi est celui du développement durable, notamment sous l’angle environnemental : émissions de CO2 et développement de nouveaux matériaux de construction.
Défis et risques s’entrecroisent quand on constate le manque de croissance, la faiblesse des politiques industrielles en France et en Europe, mais aussi l’absence d’anticipation dans les entreprises, des stratégies qui ne semblent orientées que par la recherche de résultats et de profits à court terme. Alors le choix des pays à bas coûts risque de se retourner en coup bas pour l’emploi !

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