Le RJF ( réseau juridique fédéral ) s’est rassemblé le 19 juin autour de la thématique du harcèlement, au cœur de l’actualité, depuis la décision du Conseil constitutionnel en date du 4 mai 2012 qui a conduit à l’abrogation de l’article L 222-33 du code pénal, relatif au harcèlement comme constitutif d’infraction pénale. Il était nécessaire d’apporter aux participants du RJF un éclairage complet sur le dispositif de la « question prioritaire de constitutionnalité » et ses conséquences.
La question prioritaire de constitutionnalité est un dispositif prévu par l’article 61-1 de la Constitution. Ce dispositif permet aux justiciables de contester la constitutionnalité d’une disposition législative lors d’une instance en cours devant une juridiction (qu’elle soit civile ou administrative). En effet, le justiciable est en droit d’estimer qu’une dispo-sition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution lui garantit au travers de nombreux textes (Constitution de la Vème République de 1958, Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, Préambule de la Constitution de 1946).
C’est sur ce fondement que le Conseil constitutionnel a été saisi par un justiciable qui estimait que la loi pénale relative au harcèlement était « trop imprécise, floue, et ne définissait pas le harcèlement avec suffisance » pour justifier une condamnation privative de liberté. Le Conseil constitu-tionnel a estimé l’argumentation recevable pour abroger la loi. Quid alors des victimes ! En l’absence de loi, il ne peut y avoir de condamnation ! Alors qu’il a été fait le constat édifiant qu’en 10 ans d’application d’une loi, près de 80 personnes ont été condamnées par an (soit 800 condamnations fondées sur une base légale !) le vide juridique pénal s’installait… et disparaissait les notions de trouble à l’ordre public, de possible condamnation avec inscription au casier judiciaire.
Pour autant, le harcèlement reste bel et bien inscrit au Code du travail. Qu’il s’agisse de harcèlement moral ou sexuel, toute forme de harcè-lement est prohibée dès lors qu’elle s’exerce au travail. Le harcèlement existe sous bien des formes : pratiques relationnelles dégradantes, pratiques d’isolement, pratiques persécutrices, punitives ou dite injonction paradoxale (à titre d’exemple faire coller à un salarié les timbres à 4mm du bord de l’enveloppe !), aussi il n’existe pas un mais des harcèlements. Mais la seule condamnation possible est l’allocation de dommages et intérêts.
La Cour de Cassation a, sur le sujet engagé, un travail pédagogique à l’intention de ceux qui plaident défendent ou jugent le harcèlement. Le sujet est compris et traité professionnellement. L’employeur a ainsi l’obligation au 1er juillet 2012 de désigner un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise. Cette obligation est inscrite à l’article L 4644-1 du Code du travail. Les moyens d’actions syndicales et juridiques existent. A l’attention des équipes, le support pédagogique « harcèlement » élaboré pour le RJF sera mis en ligne sur le site de la FCE. Ce support sera bien sûr actualisé en fonction des derniers travaux parlementaires.
A l’heure où nous imprimons cet article, la loi relative au harcèlement sexuel, qui rétablit le délit dans le Code pénal est parue au Journal officiel du 7 août. La loi rétablit l’article 222-33 du Code pénal et alourdit par ailleurs les sanctions encourues et les élargit au harcèlement moral. Aussi, le harcèlement qu’il soit sexuel ou moral, est désormais puni d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. En cas de circonstance aggravante, le harcèlement sexuel est lui puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Le prochain RJF se déroulera le 16 octobre 2012. Nous traiterons l’utilisation du budget de fonctionnement du CE, le parcours professionnel des militants inscrit dans la loi relative à la représentativité et les conséquences des procédures de redressement ou liquidation judiciaire des entreprises. Une journée dense en perspective.