Issue de la branche Caoutchouc, Jennifer Vieau a su, par son enthousiasme et sa détermination, se faire une place dans un milieu professionnel à la suprématie masculine. En intégrant la Fédération en tant que déléguée fédérale, elle se veut la porte-parole d’un militantisme féminin, ambitieux, au plus près des militants.
Mag FCE : Bonjour Jennifer, peux-tu nous parler de ton parcours syndical ?
Je suis entrée chez Stacem en 2012, et en 2014, j’ai pris un mandat d’élue sans étiquettes. Comme un collègue adhérent CFDT a vu que je galérais, il m’a conseillé de me syndiquer. La CFDT a été une évidence. Après tout a été très vite. En 2018, j’ai fait adhérer 12 collègues et créé une section. Isabelle Rault, secrétaire générale du Syndicat Bretagne, m’a nommée représentante syndicale trois mois avant les élections, puis DS. En 2020, j’ai pris un mandat aux prud’hommes et, un an après, j’étais détachée à mi-temps pour l’UD du Morbihan. Je dépendais de l’URI Bretagne et j’étais chargée de mission TPE. J’ai été mise en relation avec Stéphane Galiné, le délégué fédéral de la branche, à l’époque. Le manque de représentants PME m’a permis d’intégrer rapidement le groupe des négociateurs.
Mag FCE : Tu es donc devenue militante sans passer par la case adhérente ?
Effectivement. Les deux premières années, j’ai suivi un maximum de formations syndicales et juridiques. Au-delà de la théorie, il y a aussi les rencontres que l’on peut y faire et qui sont hyper-formatrices, car c’est là que tu crées ton réseau. Grâce à cela, j’ai pu toucher à tous les champs de la CFDT.
Mag FCE : Tu étais négociatrice, tu passes DF du Caoutchouc, qu’est-ce qui a changé au sein de l’équipe ?
Rien. Avec le groupe, on peut discuter et débattre de tout, ne pas être d’accord… à la fin, la décision est toujours prise à la majorité. Ce sont eux qui m’ont poussée à prendre ces responsabilités. Bien sûr, j’ai beaucoup réfléchi avant, mais une fois la décision prise, ça s’est fait naturellement.
Mag FCE : Et à l’extérieur…
Je suis super fière, parce que je suis une femme, jeune maman, et issue d’une PME. C’est un peu l’aboutissement de tout ce pourquoi je milite, à savoir l’épanouissement professionnel des femmes, avec un bon équilibre vie professionnelle, vie privée. Fière aussi d’être la première DF dans une branche où il y a 80 % d’hommes. Être la seule femme en négo, et en responsabilité, je vois bien que, pour certains, ça tique un peu, mais ça me booste.
Mag FCE : Comment envisages-tu la suite ?
En premier, j’aimerais faire entendre la voix des PME, organiser aussi des rencontres avec les DSC, avec les liaisons Hutchinson, Michelin… Aller chercher de nouveaux militants (femmes, jeunes, issus de PME…) pour négocier. C’est un excellent exercice pour monter en compétences. Pour l’instant, avec la catastrophe Michelin, je navigue à vue. Mon rôle, en tant que DF, dans cette période de crise, c’est de me mettre à disposition des équipes, d’être à leur écoute, et de leur apporter de la matière s’ils sont en difficulté. Toute la branche est très sensible à ce qui se passe actuellement à Vannes et à Cholet. Je sais que les militants sur place ont reçu beaucoup de soutien. Ils savent qu’en cas de besoin on fera le déplacement. Que je garde la tête froide quand, pour eux, c’est compliqué, est essentiel. Il faut que, sur place, ils arrivent à gérer tout ça. En tout cas, nous mettrons tout en œuvre pour les aider, parce que l’on se sent toucher en plein cœur.
Mag FCE : Pour finir, tu viens d’assister à ton premier CDF, qu’en as-tu pensé ?
J’ai adoré. J’adore les temps statutaires, ce sont toujours des moments riches en débats qui sont très instructifs, qui boostent, qui motivent, et puis qui te font dire, au final, que tu te sens vraiment à ta place.