MAG FCE : Bonjour Christian, peux-tu nous présenter ton parcours professionnel ?
J’ai commencé en 1990 chez Gaz de France en tant que répartiteur. J’ai été exploitant de réseau de transport gaz, gestionnaire de contrats d’achat, optimiseur de portefeuille en salle des marchés et chef de projet d’ingénierie. Je suis actuellement responsable du département Intégrité Puits et maître d’ouvrage des opérations de maintenances lourdes sur puits chez Storengy France.
MAG FCE : Tu es administrateur salarié depuis septembre 2023, en quoi consiste ton poste ?
J’ai été présenté par la CFDT lors des élections au CA de Storengy France sur le collège Cadre, et plutôt bien élu, avec 75,5 % des votes (+30 % par rapport aux dernières élections) pour une participation de 73 %. Le CA est l’organe de gouvernance de Storengy France, il détermine les orientations de l’activité de l’entreprise et s’assure de leurs mises en œuvre par la direction générale. Il est composé de deux administrateurs salariés : un pour le collège Exécution/Maîtrise et un pour le collège Cadre, et de six autres administrateurs nommés par l’actionnaire (des directeurs de chez Engie et un administrateur indépendant). Le CA et ses commissions se réunissent environ une dizaine de fois par an.
MAG FCE : Qui est l’équipe CFDT Storengy ?
La CFDT était la 4e OS chez Storengy (14 %) il y a huit ans. Elle est aujourd’hui la 2e, avec 32 %. La CFDT Storengy, c’est une équipe qui s’étoffe. On compte environ 40 adhérents sur les 600 salariés, et le nombre ne cesse d’augmenter. Les élections CSE qui viennent de se terminer marquent une progression de 12 %, ce qui entraîne plus de sièges, plus de représentants. Alberto Da Silva et David Raffray, qui ont pris la suite de Martine Ravary, vont être DS et élu CSE mis à disposition à 100 %. Ce sont les deux piliers de cette nouvelle équipe constituée de copains et de copines. Tout se passe dans la bonne humeur, c’est une équipe qui partage des valeurs, qui a des principes, et tout cela, c’est très important pour moi.
MAG FCE : Tu es adhérent depuis janvier 2023, pourquoi avoir choisi la CFDT ?
Depuis que j’ai commencé à travailler, il y a 33 ans, j’ai toujours été sensible au mouvement syndical, mais les postes que j’ai occupés : manager, participation aux Codirs, plutôt porteur de la parole de la direction… ont fait que je n’osais pas me lancer. Ce qui m’a fait basculer, c’est l’évolution du management dans nos sociétés. Quand je dis « nos sociétés », c’est les évolutions successives de l’ex-Gaz de France. On est passé d’un management plutôt paternaliste, avec une dimension sociale assez développée, une attention aux personnes qui était marquée, à un management de plus en plus dur. Je suis humaniste à la base, et j’ai du mal à me retrouver, en tant que manager, dans cette posture. La réforme des retraites a été un gros marqueur. Lors des manifestations, je me suis rapproché de l’équipe CFDT que je connaissais, et j’ai participé aux défilés avec eux, surpris par la taille des cortèges CFDT. J’ai apprécié la gestion interne, le personnage de Laurent Berger, même si je l’estimais déjà avant. Mais le voir fédérer cette intersyndicale, le voir réussir à faire vivre tout ça… Cette vision du combat, ça m’a plu.
MAG FCE : La CFDT Storengy fait +12 % au CSE, comment peux-tu expliquer cette progression ?
Pour moi, elle vient du fait que l’équipe a à cœur de gérer toutes les catégories de salariés. Les discours sont apaisés, l’important étant de construire une relation, de trouver une solution de compromis. Grâce à un travail sans relâche, l’équipe a fait basculer beaucoup de monde vers la CFDT. De nombreux salariés sont en mal-être et demandent à être accompagnés. Notre force, c’est de créer du dialogue avec eux comme avec la direction. Le travail effectué est énorme, peu visible parce qu’on ne peut pas trop communiquer sur ces aspects-là, pour autant, ça se sait, et ça fait des adhésions et des sympathisants. Ce qui fait que la CFDT a progressé, c’est avant tout le travail et les solutions apportées.
MAG FCE : Comment la direction a réagi à ton adhésion ?
Pour beaucoup, c’était une surprise, parce que ce n’est pas habituel qu’un manager avec mon profil se présente à ces élections. Pour autant, j’ai eu énormément de retours positifs, notamment de la direction. Pour un cadre qui a un statut établi dans l’entreprise, c’est plutôt bien vu. La direction a besoin d’interlocuteurs fiables, c’est indispensable. Je sais que la majorité du haut management est présente dans les 75 % de votants. Ma décision était réfléchie, cependant je suis quand même étonné et surpris, dans le bon sens du terme, des réactions que j’ai reçues.
MAG FCE : Quelles actions avez-vous mises en place au sein de Storengy ?
Toutes les personnes qui se sont présentées, qui ont pris des mandats par conviction sont reconnues professionnellement. La progression de la CFDT, c’est grâce aux élus qui s’impliquent et qui s’investissement, c’est le fruit d’un travail porté par des personnes qui ont une bonne image dans l’entreprise. En CA, on a fait 75 % sur le collège Cadre, on n’était pas présent sur le collège Exécution/Maîtrise, parce qu’on n’avait personne à présenter. En CSE, on a fait 63 % sur le collège Cadre, et 13 % sur le collège Exécution/Maîtrise, c’est là que l’on doit progresser. Comme l’équipe s’est construite autour de cadres, ce sont eux qui se tournent plutôt vers la CFDT. Maintenant, il faut aller convaincre les autres collèges. La difficulté, c’est que le personnel est réparti à travers la France. On a commencé lors des grèves contre la réforme des retraites, où, tous les matins, nous participions aux AG de l’intersyndicale en visio. L’approche a plu. Maintenant, quand on va sur les sites, on se souvient de nous, les salariés viennent nous parler, et des adhésions se font. C’est plus dur, parce qu’un site de stockage, c’est comme une petite usine, et que la CGT est historiquement très présente. Mais on y va par étape. On a également identifié un relais local sur les sites et on va commencer à faire de la communication un peu plus marquée… c’est aussi une de nos forces. C’est un gros boulot, mais c’est important et essentiel pour faire passer nos messages. C’est le travail des quatre prochaines années. L’autre axe, c’est les infrastructures gaz d’Engie, notamment Elengy et GRTgaz. J’ai passé la moitié de ma carrière chez GRTgaz, j’ai un réseau assez large et je pense que l’on pourrait essayer de profiter de ce qui se passe chez nous pour le propager chez eux, faire des choses ensemble, s’élargir.
MAG FCE : Quels conseils donnerais-tu à des jeunes militants ?
Etre convaincu, ne pas être seul, car c’est beaucoup d’implication et de travail. Il faut aussi être capable de s’adapter, car ce n’est pas en restant à son poste de travail qu’on embarque les gens avec soi. Ce qui fonctionne, c’est communiquer, rencontrer, échanger avec les salariés. Il faut créer de la convivialité… être ouvert à tous et aux débats. Tout le monde n’est pas d’accord avec nous, pour autant, plus on discute, plus on s’enrichit, et plus on est visible. Beaucoup de salariés ne savent pas où se positionner. Naturellement, ils vont vers ceux avec qui ils ont eu le plus d’échanges. Pour terminer, je dirais que la CFDT, c’est une belle aventure. Ça me fait un bien fou à la tête. Ça me permet de retrouver aussi l’esprit de nos entreprises d’avant que l’on a vraiment perdu… je ne regrette rien.