Françoise Tiesset, aide chimiste, est adhérente à la CFDT depuis 1990. Après un premier mandat de DP en 91, elle est aujourd’hui secrétaire du CE, du CCE et membre du comité directeur fédéral. Elle répond aux questions de la FCE pour expliquer les pratiques syndicales dans sa section composée de plus de 1 300 adhérents et qui vient de faire le plein des sièges aux élections de DP et CE, le 11 octobre 2001.
FCE : Comment expliques-tu votre réussite dans la durée ?
Françoise Tiesset : Il n’y a pas de recette miracle. Ce qui compte, c’est la mise en place d’un travail d’équipe, la volonté de garder un haut niveau de syndicalisation, d’être très proche du terrain. En plus du collectif de militants, nos 70 collecteurs sont chargés d’écouter et d’informer les adhérents.
FCE : Quelle a été votre stratégie pour remporter tous les sièges Ouvriers, Employés, Techniciens et Maîtrise aux élections ?
F.T. : En 1999, nous avons perdu 6 sièges à quelques voix près au profit d’une CFTC peu active. Cette année, en octobre 2001, nous avons organisé notre campagne en trois temps.
Un mois avant les élections, un premier tract est distribué à l’ensemble du personnel. Il rappelle toute l’action et les résultats obtenus par la CFDT (accord 35 heures et plus de 200 embauches, départs en préretraite Arpe, revalorisation conséquente des salaires, de l’intéressement et de la participation
).
La seconde initiative, auprès des seuls adhérents, consiste à leur expliquer le travail réalisé depuis deux ans, la volonté de la section de récupérer les sièges perdus, la nécessité de mobiliser leur entourage et les inciter à expliquer les positions de la section à ceux qui ne la partagent pas.
Enfin, un tract général à l’ensemble des salariés, rappelle l’enjeu du scrutin, l’importance de voter pour diminuer les abstentions, les modalités du vote pour éviter les bulletins nuls et les pertes de voix. Le résultat est là : près de 79 % de votants et plus de 92 % de voix pour la CFDT.
FCE : Quelles sont les particularités de votre action syndicale ?
F.T. : Comme dans toutes les entreprises, notre action est permanente et multiple. Par exemple, l’aménagement du temps de travail, lié à l’application des 35 heures, génère encore quelques difficultés à résoudre. Nous agissons auprès des responsables quand des dérives apparaissent.
Nous sommes très actifs pour défendre individuellement les salariés menacés de sanction ou de perte d’emploi, pour améliorer les conditions de travail et de sécurité. Notre section a acquis une bonne connaissance et une maîtrise des réalités économiques de l’entreprise. Cela nous renforce pour légitimer nos revendications salariales et nous positionner face aux restructurations que veut imposer l’entreprise.
FCE : Quelles leçons tires-tu d’être très majoritaire ?
F.T. : Cela nous crée des responsabilités supplémentaires puisque nous sommes l’acteur principal. Nous n’avons pas le droit de nous tromper. Nous devons beaucoup discuter avec les salariés et dépenser beaucoup d’énergie lorsque nous négocions. Par exemple, au moment de négocier les 35 heures, il a fallu tenir compte des besoins exprimés par les différentes catégories du personnel : jour, postés
Cette négociation globale de tous les régimes de travail en même temps a été un dossier énorme, jamais mené auparavant. L’accord a donc été décliné et adapté pour chaque situation. Nous avons organisé un vote de confirmation de signature, dans chaque catégorie, 15 jours avant les élections de 99.
Réalités économiques et industrielles
Entreprise familiale, créée en 1933, Roquette compte aujourd’hui plus de 4 500 salariés dont 1 500 à l’étranger. L’établissement est situé à Lestrem à une trentaine de kilomètres à l’ouest de Lille.
Son chiffre d’affaires consolidé avoisine les 10 milliards de francs.
A partir du blé, de la pomme de terre et du maïs, l’entreprise fabrique de l’amidon ou des produits dérivés. Plus de 600 produits sont réalisés pour quatre grands secteurs : alimentation, papier-carton, pharmacie et cosmétiques, chimie. Grâce à une technologie de pointe, les produits Roquette bénéficient d’une renommée mondiale.
En augmentation régulière, le site comprend environ 2 600 salariés (CDD et intérimaires compris) avec près de 500 femmes. 1 229 sont ouvriers, 593 employés, 646 maîtrises. Plus de la moitié travaille en horaire de jour, 700 en 6X8, le reste en équipe 2X8, 3X8, 4X8.
Réalités syndicales
La section, créée au début des années 60, comprend aujourd’hui plus de 1 300 adhérents.
La CFTC, qui n’a plus d’élus, et la CGC sont les autres organisations syndicales présentes.
La CFDT recueille la totalité des sièges dans les collèges ouvriers, employés, techniciens et maîtrises.
Le collectif de section regroupe 46 militants (es) élus (es) ou mandatés (es) en CE, DP, CHSCT avec une moyenne d’âge de 41 ans. Il se réunit chaque jeudi pour recenser tous les problèmes et demandes des salariés, décider des actions et positions.
Les 3 principaux chantiers à venir concernent les futures restructurations (projet cristal en vue d’installer le logiciel de gestion intégrée Sap), l’avenir des retraites, l’évolution économique de l’entreprise.