C’est une révolution institutionnelle importante et historique qui est soumise au débat dans notre pays aujourd’hui.
En inscrivant dans la Constitution que la France est une République indivisible et son organisation est décentralisée, le gouvernement rompt avec un pan de l’histoire qui a structuré la nation depuis la naissance de la République.
Une nouvelle époque
Les Français attachés à la tradition jacobine, consacrée par la Révolution française, en sont pour leurs frais. Une nouvelle époque s’ouvre.
En affirmant dans la loi fondamentale de notre pays l’émancipation des régions, le principe de subsidiarité, l’autonomie financière des collectivités locales et la démocratie de proximité, le Premier ministre veut aller beaucoup plus loin que les premières lois de décentralisation impulsées par la gauche dans les années 80.
Partant du principe que la France est bloquée, ce dernier veut se servir de ce projet de loi comme un levier pour réformer l’Etat et favoriser les responsabilités territoriales qui encouragent les initiatives.
La participation, un impératif
La participation de tous les citoyens, dans les forums régionaux de discussions organisés actuellement est un impératif. Les syndicalistes sont concernés par cette démarche et doivent prendre part aux échanges sur cette question lourde. Le fait que la proposition gouvernementale soit assise essentiellement sur la base d’expérimentation demande des assurances fortes sur la cohésion sociale et territoriale pour demain.
Décentralisation, émancipation
La CFDT, qui a toujours été favorable aux mouvements de décentralisation basée sur l’émancipation, doit rappeler ces exigences fortes.
Le dispositif prévoit que les initiatives régionales, si elles sont jugées positives, seront étendues à l’ensemble du pays.
Qui aura la compétence pour analyser le retour d’expérience et sur quelles bases ?
Pendant les phases d’initiatives territoriales à durée déterminée, le risque d’avoir une France à vingt-deux vitesses peut devenir une réalité.
Il ne faudrait pas que, sous couvert de démocratie locale basée sur la pratique du référendum, notre pays contourne les débats de la représentation nationale sur des sujets essentiels pour notre nation. Les interrogations suscitées par cette démarche ne doivent pas nous guider vers l’immobilisme, bien au contraire.
Lucidité, responsabilité
La portée de cette réforme va dépendre largement du contenu des transferts des compétences qui seront retenues dans le texte final.
Il est de notre devoir d’aborder ces nouvelles perspectives avec lucidité et responsabilité.
C’est le sens de notre engagement comme acteur dans la société civile qui doit être affirmé.
Un nouvel espace d’expression
Le projet de loi constitutionnelle du gouvernement consacre le principe d’une France désormais décentralisée, mais aussi un nouvel espace d’expression pour les citoyens.
De nouveaux outils démocratiques
De nouveaux outils démocratiques devraient favoriser la faculté d’expression directe de tout un chacun.
• Possibilité d’organiser des référendums décisionnels et non plus consultatifs.
• Droit à pétitionner pour obtenir l’inscription d’une question à l’ordre du jour d’une assemblée décentralisée.
• Consultation des électeurs en cas de création d’une collectivité territoriale et en cas de modification des limites de l’une d’entre elles.
mais de nombreuses questions
De nombreuses questions, à ce jour, restent posées. Le droit à l’expérimentation de nouvelles compétences est particulièrement significatif des clarifications attendues. Ce droit prévoit que les collectivités territoriales concernées pourront expérimenter de nouveaux fonctionnements sur des dossiers où un copilotage existe déjà (gestion RMI, formation professionnelle, politique du handicap, logement ), mais aussi sur de nouveaux thèmes (gestion des bâtiments hospitaliers, universitaires ).
Quels seront les critères d’évaluation de la réussite ? Quelles réversibilités ? Quelles extensions aux autres régions ?
Beaucoup d’autres interrogations restent en suspens.
Quelles articulations entre ces niveaux (Etat, régions, départements, communes) pour l’aménagement du territoire.
Quelles modifications de la réforme fiscale pour permettre l’autonomie des collectivités territoriales ?
Comment se feront les péréquations permettant un développement solidaire et équilibré des régions ?
Quelles missions pour les services publics ?
Vigilance
Nous devons rester vigilants sur toutes ces questions. Notre organisation est d’ores et déjà engagée, et les syndicats FCE en particulier, dans les assises régionales sur ce thème.
Cette présence se poursuivra lors des assises nationales qui doivent réaliser la synthèse de tous les débats décentralisés.
Premier débat en 1789
Le premier débat sur ce thème a eu lieu en 1789 à l’Assemblée constituante. Les Jacobains, tenant d’un Etat surpuissant, s’affrontent alors aux Girondins sur le redécoupage territorial de la France. 44 000 communes sont alors créées.
Durant les deux siècles précédents, et jusqu’à nos jours, une multitude de lois de décentralisation ont vu le jour.
Interrogations sur la place
des corps intermédiaires
et celle du syndicalisme ?
La CFDT tout entière s’interroge sur la place des corps intermédiaires et en particulier sur celle du syndicalisme. Comment sera-t-il pris en compte ?
Comment sera accepté leur rôle complémentaire de celui des politiques ?
Le seul renforcement des pouvoirs politiques de proximité n’est pas un gage de démocratie plus participative D’ailleurs, la généralisation des référendums décisionnels n’est pas, de ce point de vue, de bon augure.
Il s’agira aussi pour la CFDT d’établir le lien entre action revendicative nationale et territoriale.
Il y aura d’importantes conséquences sur une majeure partie de notre action dans des domaines tels que l’emploi, la formation professionnelle, la santé, l’éducation, l’aménagement du territoire