L’Agence européenne pour la sécurité et la santé de Bilbao* vient de couronner la Cram des Pays-de-Loire. A l’ombre du podium et d’une prime de 39000 euros, c’est l’action des délégués d’un CHSCT qui se voit reconnue.
Quatre ans, c’est la période qui sépare chaque olympiade. C’est aussi le temps qui s’est écoulé entre le moment où les délégués du CHSCT de l’établissement Michelin de Cholet ont souligné les risques que représente le recours anarchique aux salariés intérimaires et le mois d’octobre 2002. C’est à cette date que l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail de Bilbao a élu « meilleur projet » la convention présentée par la Cram (Caisse régionale d’assurance maladie) des Pays-de-Loire.
Une véritable avancée
1998-2002 : quatre années pendant lesquelles le CHSCT n’a pas désarmé, ni Philippe Cuignet le responsable syndical CFDT dans cette instance. Il a défendu l’idée de mettre en place un partenariat entre les entreprises utilisatrices du département et les entreprises de travail temporaire. Dans un article publié dans ce même magazine en décembre 2000, nous faisions état de l’action du CHSCT (voir encadré).
Pour la section syndicale de Cholet, la mise en place, à la fin 1999, de mesures et procédures permettant d’assurer aux intérimaires une protection équivalente à celle offerte aux salariés embauchés en CDI, est un succès. C’est une véritable avancée qu’il faut faire connaître au-delà des murs de l’entreprise, tant pour se féliciter des résultats obtenus chez Michelin que pour obtenir la même chose pour tous les salariés intérimaires, quels que soient l’endroit et les situations de travail dans lesquels ils se trouvent placés.
Les délégués se rapprochent des structures interprofessionnelles de la CFDT. L’idée de réaliser un accord avec le syndicat patronal fait son chemin. L’objectif étant de conclure avec le Medef local une résolution ou un accord dans lequel les patrons s’engagent à assurer aux salariés intérimaires des conditions de travail offrant de meilleures garanties en termes de santé et sécurité.
Un accord régional
Le patronat du département ne s’oppose pas à cette idée, mais il va avancer excuses et prétextes pour ne pas formaliser un tel engagement. La CFDT ne baisse pas les bras. C’est avec la Cram de Nantes, dans le cadre d’une commission paritaire spécialement mise en place (avec représentants des employeurs et représentants des syndicats de salariés) que le projet devient réalité.
L’accord régional se traduit par la mise en place d’un document appelé « Convention de partenariat en vue de prévenir les risques professionnels pour les intérimaires ». Ce document ou convention doit être signé par l’entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire et la Cram. Accompagnée de plusieurs annexes, cette convention n’est pas une simple déclaration d’intention, c’est un véritable outil de prévention (voir encadré).
Forte de l’expérience, la Cram a décidé de présenter cette initiative lors du concours organisé par l’agence européenne pour la sécurité et la santé au travail sur les initiatives ayant pour objet de réduire les risques dans les petites et moyennes entreprises. C’est ainsi que le dossier des Pays-de-Loire a rejoint les 359 projets venus de toute l’Europe (dont 25 projets français). La suite on la connaît, c’est le choix du jury de Bilbao de placer en tête de liste parmi tous les projets celui de la Cram de Nantes.
Aujourd’hui à Cholet, même si leurs noms n’apparaissent pas au palmarès, les délégués CFDT prennent pour eux-mêmes une partie de cette reconnaissance. Et ils n’ont pas tort, vraiment !
* Agence de Bilbao
L’agence européenne pour la sécurité et la santé au travail a été créée en 1993 par l’Union européenne.
Son rôle : protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, en fournissant une source d’informations de référence en matière de conditions de travail, de santé et de sécurité sur le lieu de travail. Ces informations sont mises à la disposition : des travailleurs et de leurs représentants, des employeurs et de leurs représentants, des gouvernements et des agences gouvernementales, de la Commission européenne, des institutions européennes, des instituts de recherche et des chercheurs.
Site internet : http://agency.osha.eu.int
Un CHSCT à l’action
En 1998, le CHSCT de l’usine Michelin de Cholet constate que les intérimaires sont victimes d’accidents du travail et ce, dans une proportion dix fois plus élévée que le taux enregistré pour les salariés en CDI de la manufacture. La direction reconnaît la pertinence de l’étude réalisée par le CHSCT. Les délégués CFDT proposent et obtiennent la création d’une commission d’accueil et de suivi des intérimaires. Du côté de la formation, les salariés des entreprises temporaires vont bénéficier des mêmes modules que le personnel « Michelin ». Le passage par le cabinet du médecin du travail est aussi devenu incontournable pour recevoir un certificat d’aptitude. Les mesures portent leurs fruits puisque le nombre d’accidents est en diminution.
Des fiches actions
Au-delà de la convention et des engagements qu’il comporte pour les parties, le document propose à l’entreprise utilisatrice, à l’entreprise de travail temporaire et au salarié intérimaire de remplir chacun une fiche comportant un certain nombre de questions. Pour l’entreprise utilisatrice le document permet d’apprécier si le poste proposé est un poste à risques. Si c’est le cas, les fiches permettent d’aller plus en avant sur les obligations que doit alors remplir l’employeur. Il y a aussi une fiche d’atelier. Pour l’entreprise de travail temporaire le questionnaire l’oblige à se préoccuper activement de la sécurité des personnes. Quant au salarié intérimaire, les questions proposées vont permettre d’évaluer les conditions dans lesquelles la mission a été effectuée.