L’entreprise n’est pas en dehors de la société. Il est donc naturel d’y retrouver les mêmes maladies, en particulier les mêmes addictions. L’addiction à l’alcool n’échappe pas à cette règle. Mais comment aborder cette question dans l’entreprise, et quel rôle les acteurs syndicaux peuvent-ils jouer ?
En France tout particulièrement, la consommation d’alcool est un rite social. Et comme avec sa famille ou ses voisins, il est de bon ton de trinquer avec ses collègues ou ses clients, au titre d’un plaisir partagé, pour souligner aussi son appartenance à un groupe. Malheureusement, cela ne va en rien favoriser la reconnaissance de la dépendance au produit. Pire, l’entreprise est parfois un lieu où les circonstances favorisent la consommation d’alcool : conditions de travail pénibles dans la chaleur notamment, ou travail manuel exposant les travailleurs à des pertes hydriques importantes.
L’entreprise et l’alcool. Chacun sait pourtant que la consommation d’alcool entraîne des modifications sensibles des capacités de travail. Le temps de réaction en est rallongé, les erreurs rendues plus fréquentes, le champ visuel rétréci, les capacités intellectuelles d’apprentissage et de mémorisation altérées, etc. Bref, le risque d’accident devient plus élevé.
Face à cette problématique, les réactions peuvent varier. Du côté de la hiérarchie directe, il n’est pas rare que l’on cherche à minimiser l’existence d’une addiction d’un salarié à l’alcool, voire à dissimuler ses erreurs commises du fait de sa dépendance. C’est alors au nom du respect de sa vie privée que tout est fait pour qu’il ne soit pas montré du doigt. Jusqu’à ce que l’irréparable soit commis… Car l’alcool au travail constitue un risque majeur pour le salarié, ses collègues, mais aussi pour l’ensemble de l’environnement direct de l’entreprise dans les scenarii les plus dramatiques.
Le rôle du représentant syndical est de créer le lien entre le salarié souffrant d’une addiction à l’alcool et les professionnels qui sauront l’aider.
Parfois, la position de l’employeur est plus stricte. Interdiction et contrôles réguliers, c’est le pouvoir disciplinaire qui est exercé. Mais la répression répond-elle mieux que le déni à cette problématique ? Ne serait-il pas plus pertinent de faire de la prévention, en informant les salariés des risques d’une addiction à l’alcool et des traitements qui existent ? Certainement, et c’est dans ce cadre que doit se situer l’action syndicale. Notamment en faisant intervenir les associations d’anciens buveurs (Alcooliques anonymes, Vie libre, etc. ) devant l’ensemble des salariés.
Quelle action syndicale ? Le rôle du représentant syndical, qu’il soit délégué du personnel, élu au Comité d’entreprise ou au Comité Hygiène Sécurité et Conditions de Travail, est aussi de créer le lien entre le salarié souffrant d’une addiction à l’alcool et les professionnels qui sauront l’aider, comme le médecin du Travail par exemple. Cela exige donc des représentants syndicaux une proximité certaine avec les salariés, et une écoute attentive. Ce travail n’est possible que si toute l’équipe syndicale se mobilise, car la tâche n’est pas aisée et ne s’improvise pas.
L’addiction à l’alcool est encore en France un sujet tabou. C’est en prenant conscience de la fréquence de cette addiction, mais aussi de toute sa complexité, que les acteurs syndicaux ont un rôle à jouer : parler librement de cette pathologie. Ici, comme ailleurs, leur rôle n’est-il pas de provoquer des changements dans l’entreprise qui se répercuteront ensuite dans le reste de la société ?
POUR EN SAVOIR PLUS
• Le site de l’Institut national de Prévention et d’Education pour la Santé (espace thématique Alcool) : http://www.inpes.sante.fr/
• Le site de la Mission interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie : http://www.drogues.gouv.fr/rubrique192.html