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Projet de fusion entre Gaz de France et Suez : explications

La rédaction de CFDT Magazine Chimie Energie a rencontré Jacques Mouton, coordonnateur des équipes CFDT à Gaz de France. Nous l’avons longuement interviewé sur le projet de fusion entre Gaz de France et Suez.

La rédaction de CFDT Magazine Chimie Energie a rencontré Jacques Mouton, coordonnateur des équipes CFDT à Gaz de France. Nous l’avons longuement interviewé sur le projet de fusion entre Gaz de France et Suez.

CFDT Magazine Chimie Energie : Jacques, tu es le coordonnateur des équipes CFDT à Gaz de France. Peux-tu nous présenter rapidement le contexte du projet de fusion entre les groupes Gaz de France et Suez ?
Jacques Mouton : Le monde énergétique européen est en pleine mutation. Les OPA des groupes Gaz Natural et E.ON sur Endesa en sont des exemples. Je pense qu’à court terme, il ne restera plus que quatre ou cinq grands groupes énergétiques européens. La FCE-CFDT travaillait depuis quelque temps sur le devenir, dans ce contexte, du groupe Gaz de France. Pour schématiser, Gaz de France n’est qu’un revendeur de gaz.
Mais, l’annonce brutale par le Premier ministre d’un projet de fusion entre les groupes Gaz de France et Suez a surpris tout le monde. Et particulièrement les agents de Gaz de France, car leur culture est fondée sur un modèle d’entreprise publique. A l’inverse de ce que connaissent les salariés de Suez, cette fusion serait pour eux un tournant fondamental.
Pour l’instant, les éléments en notre possession ne nous permettent pas encore de donner un avis motivé de la CFDT. Notre choix est de ne pas exprimer une position de rejet a priori, comme d’autres l’ont fait d’ailleurs, position qui ne serait suscitée que par la crainte de l’événement. C’est pourquoi les nombreuses questions que suscite ce projet de fusion appellent des réponses précises des deux groupes et du gouvernement. C’est pour cela que la FCE-CFDT, ainsi que les autres fédérations syndicales de l’énergie, ont posé 71 questions aux dirigeants des groupes et au ministre de l’Economie.
Ce dossier révèle aussi l’incapacité de l’Europe à définir et mettre en œuvre une politique européenne de l’énergie, pourtant essentielle et indispensable. La FCE-CFDT, en coordination avec l’Emcef (N.D.L.R. la fédération européenne à laquelle la FCE-CFDT est affiliée), a entamé un travail avec les membres du bureau du Comité d’entreprise européen de Gaz de France. Nous allons notamment lancer une étude sur les aspects industriels et sociaux, et les garanties sur l’emploi.

Y-a-t-il d’autres fédérations CFDT que la Fédération de la Chimie et de l’Energie qui soient concernées par ce projet de fusion ?
J.M. : Absolument. La FCE-CFDT est bien sûr concernée pour Gaz de France, mais aussi pour la Compagnie nationale du Rhône (CNR) et la Société hydro-électrique du Midi (Shem). La Fédération Construction et Bois pour Cofathec et Elyo. La Fédération Interco (collectivités locales) pour La Lyonnaise des Eaux. La Fédération Mines et Métallurgie pour les Ateliers de Fos (ADF) et Endel. Enfin, la Fédération des Transports et de l’Equipement pour Sita.

Quelle est la stratégie qui motive le projet industriel de cette fusion ?
J. M. : D’après les réponses obtenues lors des premières réunions que nous avons eues avec les deux groupes, ils désirent fusionner pour devenir un acteur majeur dans le secteur de l’énergie en Europe. Les investissements dans l’ensemble du domaine de l’énergie (gaz liquide, production d’électricité, environnement) contribueraient à l’ambition affichée.

Quelles conséquences pour l’emploi si ce projet devenait réalité ?
J. M. : Quand deux groupes ou deux entreprises qui ont des activités complémentaires fusionnent, les effets négatifs sur l’emploi restent faibles. Même s’il ne faut pas les négliger. Je pense en particulier aux emplois du tertiaire, qui est souvent le premier secteur touché.
Dans le cas qui nous préoccupe, les deux groupes ont des filiales qui ont des activités de même nature, en particulier dans les services énergétiques. Pour exemple, ADF de Cofathec et Endel de Suez ont des activités de même nature pour l’ingénierie de sites industriels. Même chose entre Omega de Cofathec et Axima de Suez pour les travaux d’installation industrielle. Le risque existe donc de voir des effets négatifs sur l’emploi, sauf si les territoires d’action et le potentiel de développement montrent une possible pérennité des entreprises.

On sait que la fusion entre Gaz de France et Suez placerait le nouvel ensemble industriel en position dominante sur la production d’électricité en Belgique. Il y a donc un risque, en regard de la législation européenne sur la concurrence, que certains sites soient cédés à une ou des entreprises concurrentes. Les personnels de ces sites seraient directement concernés par ces cessions. Quelle est la différence entre cette situation, qui ne provoque pas de refus dogmatique de la CFDT, et l’idée de la fusion entre EDF et Gaz de France sur laquelle la CFDT émet de fortes réserves ?
J. M. : Ces réserves ne se manifestent pas contre l’idée elle-même d’une fusion entre EDF et Gaz de France, mais en regard des conséquences sociales que cela entraînerait. Le nouveau groupe serait, en France, en position dominante sur l’électricité et le gaz. D’ailleurs, dès 2004, le Commissaire européen à la Concurrence avertissait que la fusion entre EDF et Gaz de France obligerait à la cession de plus de 40 % des actifs à des entreprises concurrentes. La Commission Roulet, qui a travaillé sur le changement de statut juridique d’EDF et de Gaz de France, avait commandité une étude qui est arrivée à la même conclusion. Cela veut dire, en appliquant une règle simple, que près de 40 % des salariés seraient contraints de quitter EDF ou Gaz de France pour intégrer un groupe concurrent. La FCE-CFDT ne peut donc cautionner un projet aussi traumatisant socialement que destructeur du modèle d’entreprise intégré que nous défendons. Ce serait une énorme contradiction !
Si nous mesurons les mêmes dangers dans le projet de fusion entre Gaz de France et Suez, nous aurons le même avis.

Si la fusion entre Gaz de France et Suez se réalisait, que deviendrait EGD, c’est-à-dire EDF Gaz de France Distribution ?
J. M. : La loi de 2004 permet d’avoir une entité mixte entre deux opérateurs, tels qu’EDF et Gaz de France. C’est le cas aujourd’hui avec EGD. La FCE-CFDT a donc demandé par écrit aux présidents de Gaz de France et d’EDF leur intention concernant l’opérateur commun, en rappelant que plus de 50 000 salariés sont tout de même concernés par la question. Pour l’instant, nous n’avons pas encore de réponse écrite à ce sujet. Cela dit, l’avenir des agents du distributeur – ERD, GRD et EGD – sera en question, même sans projet de fusion entre Gaz de France et Suez, puisque la filialisation de ces trois entités est désormais à l’ordre du jour comme l’ont été celles du GRTgaz (Transport Gaz) et de RTE (Transport Electricité). La question se complique en effet si on la pose en intégrant la fusion entre Gaz de France et Suez. C’est pourquoi cette question fait partie des 71 questions qui ont été posées au ministère et aux présidents des groupes.

Que peut-on attendre du gouvernement ?
J. M. : Tout d’abord, nous attendons un peu de respect et de considération pour les organisations syndicales et les représentants des salariés en conseil d’administration. Car la méthode, désormais peu surprenante mais toujours choquante, avec laquelle le gouvernement les ignore et les contourne, est inacceptable ! Sur le fond du dossier, nous attendons qu’il garantisse les missions de service public actées dans la loi et dans les contrats récemment signés, pour que l’éventuel futur groupe les assure pleinement. Nous voulons aussi qu’il clarifie la place du réseau de transport et de distribution du gaz. Nous voulons des engagements sur la non-remise en cause des concessions concernant le gaz et l’eau. Enfin, nous voulons qu’il étende le statut du personnel des industries électrique et gazière aux métiers de commercialisation (N.D.L.R. le statut, dans son titre principal, ne parle que « du personnel de la production, du transport et de la distribution (en situation d’activité ou d’inactivité) du gaz et de l’électricité »). Ce dernier point est d’ailleurs une revendication indépendante de ce dossier, mais elle prend davantage d’importance à cause de lui.

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